Tandis que les 43 000 pompiers professionnels, fonctionnaires territoriaux, sont représentés par 9 syndicats, les 198 000 pompiers volontaires étaient, jusqu’à présent, assez peu structurés collectivement.
Mais le début de l’année a généré une nouvelle dynamique collective. Au mois de février, le rapport de l’IGA et de l’IGSC avait fait l’effet d’une petite bombe. Celui-ci préconisait notamment de limiter les gardes postées des pompiers volontaires. Dans la foulée, le 14 février, le Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS) rendait un avis concluant à la violation par la France de la charte européenne des droits sociaux. Les pompiers volontaires étaient qualifiés de travailleurs, victimes de discrimination, notamment sur la rémunération. Face à ces avis, Gérald Darmanin maintenait ses positions : la directive européenne sur le temps de travail ne peut pas s’appliquer aux pompiers volontaires, il faut préserver le modèle. Grégory Allione, le directeur de l’ENSOSP, l’école des officiers, s’engageait quant à lui en politique et devenait député européen Renaissance avec pour objectif de « protéger » le volontariat français face à la « menace » de la directive européenne.
De leur côté, des collectifs de volontaires tentent de se faire entendre. Bruno Ménard, à l’origine du nouveau syndicat, diffusait un communiqué dès le 14 février, proposant de rejoindre un « collectif de sapeurs-pompiers volontaires ». Ce vendredi 14 juin, il annonçait, sur les réseaux sociaux et sur internet la création de son syndicat : le Syndicat des Sapeurs-Pompiers Volontaires de France (SSPVF).
Bruno Ménard a été sapeur-pompier volontaire pendant 15 ans, jusqu’en 2021, date à laquelle le Sdis du Maine-et-Loire n’a pas renouvelé son contrat quinquennal. L’homme est en litige depuis plusieurs années avec le Sdis : il se dit victime de harcèlement moral. Le tout nouveau secrétaire général donne quelques lignes directrices du syndicat : « nous voulons obtenir une revalorisation des indemnités et stopper le management toxique ». Le syndicat a dressé une liste de 42 revendications, classées en 10 thématiques : « engagement et déroulé de carrière », « droits à la retraite », « management ». Certaines pourraient surprendre, notamment sur l’accès facilité aux grades d’officier et sur la rémunération. « Lunaire », estime Manuel Coullet, secrétaire général du syndicat de pompiers professionnels Sud.
Concernant le statut des volontaires, le SSPVF exprime son attente : « Constitutionnaliser la législation sur l’activité de sapeur-pompier volontaire pour la faire sortir du champ d’action de la Charte de l’Europe et de la Directive Européenne sur le Temps de Travail ». La position de Bruno Ménard a évolué sur le sujet : au moment où il créait un collectif, avant de fonder son syndicat, il revendiquait le statut de travailleur et demandait l’application de la directive. Il assure à La Gazette : « Les revendications et actions se construiront avec la base. Dans un premier temps, on va surtout être à l’écoute ».
Le bureau du nouveau syndicat est composé de 8 membres .
- Le secrétaire général adjoint, Baptiste Girardet, est lieutenant dans le Sdis 76.
- Laure Laffargue-Sainz, caporale-cheffe dans le Sdis 32 est référente sur l’égalité homme-femme.
- Le trésorier national, Alban Febvay, adjudant-chef dans le Sdis 88, est quant à lui le référent sur les questions de harcèlement.
- L’équipe comporte également une référente handicap, Rebecca Rebour, dont le contrat de volontaire s’est terminé suite à un accident en camion de feu de forêt, qui l’a laissée en fauteuil roulant.
Un premier syndicat historique
Un autre syndicat national, ou plutôt, un groupement syndical, existe depuis une vingtaine d’années. Il revendique un millier d’adhérents et une quarantaine de sections départementales. Son secrétaire général, Samuel Mathis, rappelle que son existence a été validée par le Conseil d’Etat. « Les sapeurs-pompiers ont le droit de se constituer en syndicat, pour défendre les intérêts de leur activité et non de leur profession », souligne ce dernier.
Si le Groupement Syndical National des Sapeurs- Pompiers-Volontaires (GSNSPV) était au départ affilié à la CFTC, il ne ne l’est plus mais « bénéficie de son service juridique », détaille Samuel Mathis. Celui-ci se félicite, pour plus de pluralité, de l’émergence d’un deuxième syndicat national : « la défense des volontaires nécessite l’existence d’organisation syndicales ». Il revendique l’indépendance de son syndicat, face à la Fédération Nationale et à ses Unions départementales, « qui sont souvent financées par les Sdis ». Il explique : « Nous remontons nos réalités, factuelles et nous somme force de proposition. C’est le moment de prendre à bras le corps le sujet des sapeurs-pompiers volontaires ».
Samuel Mathis se félicite que son syndicat ait été entendu, cette année, par une mission d’information de l’Assemblée nationale sur le sujet du modèle de sécurité civile, et au Sénat sur les problématiques de santé. Mais il n’a pas été invité au Beauvau de la sécurité civile et ne siège pas dans les instances départementales ou nationales. « Trop souvent, ce ne sont pas les sapeurs- pompiers volontaires qui s’expriment sur leur propre activité », regrette-t-il. « Mais nous sentons une nouvelle dynamique ». En plus des désormais deux syndicats nationaux, une association est très active sur le sujet, le Collectif des Volontaires de Méditerranée.