Un sergent-chef de l’armée de terre se blesse gravement le 10 juillet 2013 en effectuant, comme pompier volontaire, un exercice organisé par le service départemental d’incendie et de secours (SDIS). Le ministère de la Défense le place en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS), puis en longue maladie, avant de lui concéder une pension militaire d’invalidité.
L’intéressé sollicite la réparation de ses préjudices autres que ceux de perte de revenus et liés aux incidences professionnelles résultant de son incapacité physique. Le tribunal met 23 139 € à la charge du ministère de la Défense, mais la cour estime que seule la responsabilité du SDIS peut être engagée.
Se pose la question de savoir si, en cas de blessure du sapeur-pompier volontaire, il appartient à son employeur ou au SDIS de l’indemniser des préjudices non couverts par le forfait de pension.
Comme le rappelle le rapporteur public, les sapeurs-pompiers volontaires n’ont pas en tant que tels la qualité d’agent public, ni celle de collaborateur occasionnel du service public (CE n° 73001 du 10 juin 1988).
A noter
la loi (n° 91–1389 du 31/12/1991) a créé un régime spécifique de protection sociale. En cas d’accident ou de maladie en service, le pompier bénéficie, sa vie durant, de la gratuité des frais directement liés, d’une indemnité journalière compensant sa perte de revenus pendant l’incapacité temporaire de travail, et d’une allocation ou rente pour l’incapacité permanente. Mais s’il est fonctionnaire ou militaire, il relève des dispositions statutaires, avec une option pour le régime du volontariat s’il est plus favorable (articles 1er et 19 de la loi). Dans le cadre statutaire, et pour les communes de moins de 10 000 habitants, le SDIS rembourse sur demande les frais engagés
C’est du régime de son employeur, donc de l’État, que le militaire a bénéficié.
Le droit à une indemnisation complémentaire
Reste néanmoins le principe jurisprudentiel en vigueur depuis 2003 (CE Ass. n° 211106 du 4 juillet 2003) complétant le forfait de pension. Les dispositions applicables aux pompiers volontaires déterminent en effet forfaitairement la réparation à laquelle ils peuvent prétendre de la part de leur employeur au titre des préjudices liés aux pertes de revenus et incidences professionnelles résultant de l’incapacité physique causée par l’accident ou la maladie.
A noter
si le pompier subit, du fait de l’invalidité ou de la maladie, des préjudices d’une autre nature ou personnels, il peut obtenir une réparation complémentaire, même en l’absence de faute. Sont visés les souffrances physiques ou morales et les préjudices esthétiques ou d’agrément. En cas de faute de nature à engager sa responsabilité ou liée à l’état d’un ouvrage dont l’entretien lui incombait, il est possible d’engager une action de droit commun réparant l’intégralité du dommage. Concernant les pompiers volontaires, le Conseil d’État leur a étendu ce dispositif, même si la loi prévoit qu’aucun avantage supplémentaire ne peut leur être accordé par les collectivités et leurs établissements (CE n° 409330 M. B du 7 novembre 2019).
Dans cette affaire, le pompier exerçait dans le secteur privé, laissant ouverte la question de savoir si, pour cette réparation des préjudices, en dehors du forfait de pension, le pompier a le choix de son débiteur.
Le rapporteur public recommande de retenir le SDIS et non l’employeur, au regard d’abord des termes mêmes de la loi qui ne vise que le forfait de pension, dérogeant à un principe général de responsabilité de la personne publique. En second lieu, la jurisprudence a jugé de façon constante que la règle du forfait de pension s’appliquait à la seule incapacité permanente et, s’agissant des pompiers volontaires, l’extension de ce régime de réparation mentionne bien que le pompier peut l’obtenir de la personne publique auprès de laquelle il est engagé, donc du SDIS.
S’y ajoute une considération d’équité, l’employeur pouvant être une personne publique au budget limité, petite commune ou établissement public dont il est difficile de considérer qu’il doive supporter directement les charges liées aux activités du service départemental.
Le Conseil d’État confirme que le pompier doit solliciter cette indemnisation complémentaire de la personne publique auprès de laquelle il était engagé comme pompier lors de l’accident, donc du SDIS.
CE n° 409330 M. B du 7 novembre 2019 et concl.