L’urgence climatique ou le théâtre d’un pompier devenu politique ?

1. Des paroles fortes, mais des solutions qui manquent de fond

Grégory Allione, eurodéputé et ancien sapeur-pompier, décrit avec gravité l’état des lieux : les feux de forêt sont devenus la règle en Europe, pas l’exception. Il appelle à une « OTAN de la protection civile », une stratégie européenne solide, interopérable comme dans le domaine militaire, pour faire face à ces crises grandissantes.

Mais ces préconisations rappellent surtout la rengaine d’un homme enraciné dans l’urgence opérationnelle. Là où on attendrait des propositions innovantes (investissement dans les technologies vertes, réforme de la sylviculture, renforcement des capacités locales), Allione ne propose guère que de renforcer les moyens… sans réellement secouer les structures historiques. Cette approche tactique est nécessaire, certes, mais elle reste insuffisante pour un futur où les mégafeux deviennent la normale.


2. Une Europe fragilisée, pas seulement mal préparée

Selon lui, le système européen se contente d’effets d’annonce : quelques Canadair par-ci, quelques pompiers par-là, la solidarité d’urgence reste réactive, jamais stratégique. D’ailleurs, si 95 % des départs de feu sont maîtrisés à l’échelle nationale, qu’en est-il quand la menace dépasse les frontières ?

Allione évoque 58 activations du mécanisme de protection civile en 2024 — un chiffre élevé — pour souligner que ce système fonctionne… mais est-ce vraiment une prouesse ? Quand il s’alarme de son manque de coordination ou de doctrine opérationnelle commune, il met en lumière un système européen à la dérive, limité à gérer chaque crise comme on éteint des braises, sans stratégie de maîtrise du feu.


3. L’urgence climatique : la prévention absente du radar

Allione martèle que la « saison des feux, c’est toute l’année », conséquence du dérèglement climatique et de sécheresses persistantes. Et pourtant, son discours reste largement cantonné à une logique de réaction. Où sont les appels à transformer les politiques de gestion forestière, les campagnes de prévention citoyenne ou l’adaptation des aménagements urbains ?

Face à cette passivité stratégique, on reste sur notre faim : un pompier pragmatique, mais sans vision durable. On aurait aimé entendre des mesures structurantes — comme l’intégration systématique de la gestion du feu à l’urbanisme ou la généralisation des zones tampons — mais rien de concret n’émerge de ses interventions.


4. Note personnelle : un agenda politique déguisé en alerte climatique

Derrière ses envolées lyriques et ses propositions martelées comme des évidences, il est difficile de ne pas voir un autre objectif : toutes ces polémiques semblent servir avant tout un dessein politique personnel.
On peut légitimement se demander si M. Allione ne cherche pas avant tout à se positionner pour un futur poste, pourquoi pas celui de ministre de la Sécurité civile, nourrissant un rêve ancien — pour ne pas dire plus — d’accéder à une fonction où il pourrait exercer un pouvoir accru. Un homme qui, à force de vouloir centraliser et uniformiser, laisse transparaître une soif d’autoritarisme à peine voilée.


5. La transformation oui… mais dans le respect de ceux qui agissent

La transformation indispensable de notre protection civile doit se faire dans le respect des hommes et des femmes qui, chaque jour, mettent leur vie en jeu pour secourir.
Cela implique pour les responsables politiques de respecter strictement les règles sur le temps de travail, de renforcer la reconnaissance de ces engagements par des actes concrets et durables — et non par de simples déclarations symboliques destinées à flatter l’opinion.
Depuis plusieurs décennies, trop de décisions ont été dictées par des intérêts personnels et des stratégies politiques à court terme, au détriment de ceux qui portent réellement la mission de sauver des vies.


Conclusion : un discours d’alerte, mais pas encore de rupture

Grégory Allione sert le devoir d’alerte avec autorité, forte de son expérience. Mais l’urgence exige plus que des exhortations. L’heure est à la transformation, pas seulement à l’organisation de secours. Si l’Europe veut vraiment se préparer aux nouveaux feux, elle doit embrasser une stratégie ambitieuse fondée sur la prévention, la résilience locale, la recherche et l’adaptation du territoire — pas seulement sur une OTAN du secours — et surtout bâtir cette stratégie dans le respect et la valorisation réelle de ceux qui sont en première ligne.

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