A Caen, le dossier de cette affaire s’est égaré lors du déménagement du tribunal correctionnel depuis la place Fontette, jusqu’à la presqu’île, en 2015. Le SDIS de Bayeux (pompiers) relance le parquet au sujet de la sanction éventuelle du pompier volontaire en cause. C’est donc avec une copie conforme du dossier que s’ouvre l’audience du 23 mars 2021 pour harcèlement sexuel d’un pompier volontaire au sein de la caserne sur deux jeunes recrues féminines.
Après s’en être ouverte à ses supérieurs, la première arrivée à 22 ans dans ce monde masculin, en janvier 2014, dépose plainte le 5 juillet 2015, contre son responsable de formation de dix ans son aîné. Elle avait toujours eu peur de se faire mal voir. Elle est suivie par sa nouvelle collègue, arrivée en mars 2015, deux jours après.
“Je ne savais pas comment le prendre”
En fait, dès sa 3e garde, la première remarque qu’il est entré dans la chambre réservée aux femmes pour voir sa lingerie.
S’ensuivent une série de blagues lourdes, mais, “comme il souriait tout le temps, c’était difficile de savoir si c’était des avances ou pas, je ne savais pas comment le prendre“, indique la jeune femme. Il y a aussi des questions répétées sur sa date de rupture avec son petit ami ou, lorsqu’elle fait la vaisselle, un “touche-fesses” qu’elle repousse vigoureusement. Quant à la nouvelle arrivée, elle le voit surgir dans leur chambre alors qu’elle prend sa douche.
“Pour moi, ce n’était pas du harcèlement”
L’homme, marié et père de deux enfants, qui travaille dans la fonction publique territoriale, nie tout en bloc. Il a exercé un recours contre la suspension de son activité de pompier à Bayeux.
“Je ne sais pas trop quoi vous dire, je suis pompier depuis 15 ans, et, par exemple, toucher les fesses de celui qui lave la vaisselle, c’est une tradition. Pour moi, ce n’était pas du harcèlement. Si je suis entré dans leur chambre, c’était pour leur dire de venir au rassemblement“, indique le prévenu.
Le procureur Jean-Pierre Triaulaire estime, pour sa part, que ces attitudes à connotation sexuelles sont quasi obsessionnelles, et même ses collègues hommes l’estiment “intrusif et lourd“. Il requiert dix mois de prison avec sursis et l’interdiction à vie d’être pompier. Maître Sylvie Morin-Mouchenotte, pour la défense, plaide la relaxe et considère la procédure scandaleuse. La présidente Bénédicte Delgove énonce : “Même sans intention, il s’agit bien de harcèlement sexuel“. Le prévenu écope de huit mois de prison avec sursis est interdit de l’activité de pompier volontaire pendant un an. Il doit 2000 € et 1000 € aux victimes et 200 € au SDIS pour atteinte à son image. Il a dix jours pour faire appel.